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Meunerie

Comment les filières blé et farine s’engagent pour réduire leur impact environnemental ?

Publié le 23/10/2023

La farine est un produit naturellement sobre, avec 49 g d’équivalent carbone pour 100 g de farine. Cela n’empêche pas les acteurs de la filière de se mobiliser pour améliorer leur bilan : équipements des sites de production, logistique… autant de points étudiés avec soin par l’Association nationale de la meunerie française (ANMF).

En 2024, 100 % des meuniers devraient être engagés dans une démarche de responsabilité sociétale des entreprises (RSE), dans le prolongement des mouvements amorcés au sein du monde agricole.

Dans les nouvelles constructions à ériger pour dessiner le monde de demain, chaque brique comptera. Plusieurs d’entre elles sont déjà disponibles, notamment pour faire évoluer les pratiques dans les champs.

Christian Huyghe, directeur scientifique agriculture au sein de l’Inrae, détaillait en juin dernier un arsenal d’outils « à la maturité variable » : cultures en mélange de variétés (ce qui permet de réduire les maladies), protection contre des maladies foliaires grâce à des procédés de biocontrôle, mise en place de précédents légumineuses pour améliorer la fertilisation des sols, nouvelles pratiques de culture telles que le « relay cropping » (avec du soja notamment, dont la date de floraison aura été adaptée par la mise en culture des NBT, dont l'autorisation européenne a été fraîchement obtenue), généralisation de la culture du sarrasin pour améliorer la solubilité du phosphore, mélange de cultures blé et pois, culture en bandes pour améliorer le rendement (baptisée « strip cropping » en anglais) avec mise en place de bandes d’herbe recouvertes de panneaux photovoltaïques… c'est un véritable arsenal de solutions qui s'ouvre à la filière grâce au progrès technologique.

Dans cette mutation, la formation des agriculteurs sera indispensable pour assurer un déploiement efficace, tout en capitalisant sur des outils numériques améliorant les contrôles de la production, à l'image des solutions développées par les start-up Spore Biotechnologies (détection bactérienne instantanée, sans laboratoire extérieur), Inarix (utilisation des Smartphones comme de véritables « laboratoires de poche » pour analyser les grains) ou Javelot (optimisation du stockage de matières premières agricoles grâce à la data).

La décarbonation, un effort de filière

À terme, c'est chacun des maillons de la chaîne allant du grain au pain qui devra s'engager pour la neutralité carbone visée d'ici à 2050. À ce titre, une feuille de route « décarbonation », portant sur des actions à horizon 2030, avait été signée entre l’organisation et les ministres de l’Agriculture Marc Fesneau et de l'Écologie Christophe Béchu lors du Salon de l’Agriculture 2023.

Cécile Adda, responsable RSE pour les filières céréalières françaises au sein d'Intercéréales, a esquissé les contours du plan envisagé, qui devrait être diffusé prochainement. « L'impact carbone devra être divisé par trois au sein de la filière en 2050. Concrètement, cela signifie que les émissions seront divisées par deux sur la partie production agricole, tandis que le reste des acteurs (stockage, transformation…) devra tendre vers zéro émission. »

Sur le territoire français, les entreprises de meunerie disposent de filières locales, qui leur permettent de limiter les émissions de CO2liées au transport du grain. La configuration de certains sites permettent également de réceptionner la matière première par voies fluviale ou ferroviaire.

Les grandes coopératives sont d’ores et déjà à la manœuvre afin d’accompagner les agriculteurs dans ce mouvement collectif. Chez Axéréal, la démarche se nomme CultivUp et s’appuie sur des critères économiques, sociaux et environnementaux, avec traçabilité complète des pratiques raisonnées, utilisation d’outils d’aide à la décision ou encore des pratiques favorables au développement de la biodiversité et à la santé des sols.

Côté Vivescia, le programme Transitions, dévoilé début septembre, ambitionne de rassembler 1 000 agriculteurs d’ici à 2026 pour bâtir une agriculture régénérative, bonne pour la planète, le climat et la biodiversité et aboutir à une réduction de 20 % d’émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030. Pour y parvenir, la coopérative veut développer des « fermes systèmes et connectées », tout en impliquant les entreprises transformatrices pour partager les efforts entre l’amont et l’aval.

Dépasser les labels et initier des démarches globales

Pour aller au-delà des labels de qualité désormais bien connus dans l’univers du pain (label Rouge, bio, CRC…), des meuniers veulent marquer leur différence en s’inscrivant dans des démarches de certification globales. C’est le cas de la Minoterie de Leforest, emmenée par Olivier Dubois : l’entreprise a obtenu le label Engagé RSE et Responsibility Europe d’Afnor Certification, lui-même aligné avec les standards de la norme internationale ISO 26 000.

50 critères sont évalués sur site tous les deux ans, amenant le meunier à prouver sa maîtrise des impacts sociaux, environnementaux et économiques auprès du certificateur. Des représentants des salariés et des parties prenantes externes sont également interrogés, ce qui permet d’avoir une vision globale de la démarche engagée par l’entreprise, tout autant que de sa profondeur et de sa cohérence. Ainsi, la minoterie communique de façon transparente sur ses politiques d’achats et de ressources humaines ou encore ses pratiques éthiques.