L'actualité de votre univers professionnel

Consommation

Les titres-restaurant : avantage social et charge pour les artisans

Publié le 20/10/2023

À l’heure du déjeuner, un compagnon s’est imposé parmi les habitudes quotidiennes de 4,5 millions de Français : inscrits dans la loi en septembre 1967, les titres-restaurant constituent autant un avantage social qu’une source supplémentaire de complexité pour les commerces faisant le choix de les accepter.

Avec la cessation d’activité de la Centrale de règlement des titres (CRT) en février, il est devenu en effet nécessaire de s’affilier auprès de chaque émetteur, et de traiter les tickets spécifiquement avant de les envoyer. La déclinaison digitale n’améliore pas le constat, avec des commissions toujours plus élevées.

Les émetteurs ne font pas que fournir des titres de paiement, qu’ils soient au format papier ou carte électronique : ils sont également des… apporteurs d’affaires.

C’est cette qualité que des entreprises telles qu’Edenred, UpDéjeuner, Sodexo… mettent aujourd’hui en avant pour justifier des niveaux de commission nettement supérieurs à ceux proposés par les organismes bancaires dans le cadre du traitement des transactions réalisées à l’aide des terminaux de paiement électroniques (TPE).

En effet, le fait d’accepter les titres-restaurant est un facteur de choix pour les salariés dans leur consommation hors domicile… La dématérialisation apparaissait comme un espoir de réduction de cette charge, du fait du traitement automatique et simplifié des paiements.

C’est pourtant l’inverse exact qui s’est produit, puisque la commission prélevée peut culminer à 5 %, voire 6 % du montant hors taxes de la transaction.

Une pratique dénoncée par l’Union des métiers de l’industrie et de l’hôtellerie (UMIH), dont les membres ont vu leurs marges se contracter en raison de l’envolée des charges et du coût des matières premières… de la même façon que les artisans boulangers-pâtissiers.

La fin du papier

Ainsi, certains professionnels ont fait un choix radical : refuser le ticket-restaurant papier, devenu trop coûteux à gérer, voire l’ensemble de ces titres, y compris en version dématérialisée.

Une enquête menée récemment par la start-up Openeat et la communauté des Toqués de restauration, sur le sujet, démontre la grogne montante : près de 20 % des 700 restaurateurs interrogés s’en sont détournés.

Pour la version papier, le taux grimpe même à un sur trois (soit près de 33 %). De quoi susciter une réaction du Gouvernement : fin septembre, la ministre déléguée, Olivia Grégoire, a pris la parole afin d’annoncer l’arrêt du ticket restaurant papier « avant 2026 », ainsi qu’un plafonnement des commissions si un fonctionnement inéquitable du marché de ces titres était révélé par l’Autorité de la concurrence, saisie sur le dossier.

En 2019, l’Autorité de la concurrence avait infligé de lourdes amendes, pour un total estimé d’environ 419 millions d’euros, aux quatre émetteurs historiques et à la CRT.

Il leur est reproché d’avoir « échangé tous les mois, par le biais de la CRT, des informations commerciales confidentielles […] ce qui a permis de restreindre la concurrence entre eux » et d’avoir « adopté une série d’accords ayant pour objet de verrouiller le marché des titres-restaurant en contrôlant l’entrée de nouveaux acteurs et en s’interdisant réciproquement de se lancer dans l’émission des titres dématérialisés ».

Un modèle alternatif plus vertueux pour les artisans et restaurateurs

Cette volonté de verrouiller le marché n’a pas découragé des entreprises aux orientations plus éthiques, telles que Worklife.

La start-up française a en effet développé une solution sociale et solidaire avec un modèle économique où les charges ne reposent pas uniquement sur les artisans et restaurateurs : l’entreprise finance la carte Worklife et aucuns autres frais que ceux de la commission bancaire traditionnelle ne sont débités lors du paiement, grâce à l’utilisation des réseaux Visa ou Mastercard.

Ainsi, seul un agrément fourni par la Commission nationale des titres-restaurant est nécessaire, sans conclure de contrat supplémentaire comme c’est le cas avec les autres émetteurs… avec, de plus, la garantie d’un remboursement rapide.

En l’absence d’un encadrement des commissions, tel que souhaité par l’UMIH, cette option s’avère aussi séduisante que disruptive.