L'actualité de votre univers professionnel

DIVERSITÉ

La féminisation de l'apprentissage progresse rapidement en boulangerie, pâtisserie et chocolaterie

Publié le 19/10/2023 |

En moins de 10 ans (de 2012 à 2021), la part des apprenties dans les métiers de bouche a quasiment doublé, passant de 15 à 25%. Si les femmes demeurent majoritaires dans les métiers de vente et de gestion, elles s'invitent également dans les laboratoires : ainsi, la "boulangère" n'est plus uniquement la compagne de l'artisan, et ses compétences se déploient bien plus largement... participant ainsi à créer des entreprises plus équilibrées, intégrant mieux la diversité des individus.

Les femmes sont devenues majoritaires au sein des classes d'apprentissage en chocolaterie

Les chiffres communiqués par l'Observatoire des Métiers de l'alimentation en détail dans une étude d'avril 2023 montrent le chemin parcouru autant que les pistes de progrès à suivre pour continuer à progresser. En boulangerie, les apprenties représentaient en 2021 16% des jeunes formés, contre seulement 6% en 2012. C'est du côté des arts sucrés que les progressions sont les plus spectaculaires : en pâtisserie, le taux atteint 43% (26% en 2012)... et même 51% en chocolaterie ! (30% en 2012). Le choix de se tourner vers ces métiers traditionnellement masculins est basé sur des aspirations profondes : pour 35% des apprenties, il s'agissait d'un rêve d'enfant (selon des études menées par Quali Quanti pour le compte de l'Observatoire des Métiers de l'alimentation en détail en 2019 et 2021). Ce relation intime entretenue avec leurs futures professions dépasse largement celle développée chez les hommes, qui n'étaient que 27% à rêver très tôt de leur futur métier. Ces vocations peuvent être mises de côté du fait de bons résultats scolaires, ce qui retarde leur intégration dans les filières professionnelles : après avoir poursuivi pendant plusieurs années des formations dans les voies générales, elles se réorientent ensuite vers l'apprentissage. Dès lors, les apprenties sont plus âgées : seules 39% sont mineures, au lieu de 50% chez les hommes.

Des obstacles à surmonter pour intégrer durablement les filières de la gastronomie

Malgré cette encourageante progression, de nombreux obstacles demeurent positionnés sur le chemin de ces futures professionnelles du goût : l'accompagnement qui leur est offert pour l'orientation est largement jugé comme insatisfaisant. Elles sont ainsi 43% à témoigner d'un suivi insuffisant de la part de leur ancien établissement. Une démonstration poignante que des modes de pensée reservant les publics féminins à des métiers peu physiques ou manuels sont encore bien ancrés dans les pratiques de personnels devant, pourtant, permettre l'épanouissement futur des jeunes dans leur environnement professionnel. Les bonnes élèves sont alors contraintes à imposer fermement leurs voeux d'orientation vers un CAP et l'apprentissage, d'autant plus si elles sont bonnes élèves, auquel cas le lycée général semble encore trop souvent la seule option raisonnable pour le corps enseignant.

Côté entreprises, la situation n'est guère plus encourageante : la durée de recherche est particulièrement longue pour les apprenties, notamment dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie. Elles sont ainsi 42% à passer plus d'un mois sur cette phase. 25% des apprenantes ont du solliciter plus de 10 entreprises avant de trouver une structure d'accueil, un taux doublé par rapport à celui observé chez les hommes(13%). Cela s'explique notamment par le manque d'expérience des entreprises d'accueil en la matière : à défaut d'avoir eu l'occasion par le passé d'ouvrir leur porte à un personnel féminin, de nombreux artisans préfèrent refuser sans même avoir questionné l'idée et ce que cela pourrait apporter de positif à la structure. Non seulement un effort d'adaptation est nécessaire pour rendre les fournils et laboratoires accessibles à tous les publics, avec une ergonomie soignée et une réduction des ports de charge, mais la pédagogie doit également être accrue pour renforcer l'intégration des apprenties dans les boulangeries, pâtisseries et autres établissements des métiers du goût. En la matière, les nouvelles générations de chefs d'entreprise se montrent généralement plus ouvertes au changement et à l'intégration de la diversité au sein de leurs structures.

L'adaptation n'est pas seulement d'ordre matérielle ou physique : le mode d'organisation du travail est également remis en question. Pour fidéliser durablement les femmes au sein de l'artisanat, les entreprises devront être en capacité de leur offrir des horaires permettant de concilier vie professionnelle et vie personnelle, un sujet particulièrement fort dès lors que les gardes d'enfant sont évoquées. A défaut de solutionner ces problématiques, le public féminin peut être amené à se tourner vers des alternatives garantissant des horaires fixes et un cadre de travail moins contraignant, comme la grande distribution ou les centres de formation. Un véritable constat d'échec pour des filières où chaque bras compte... mais autant autant de perspectives de progrès pour les années à venir.